Il est inutile de démontrer la richesse fabuleuse des archives russes, mal exploitées ou fermées aux chercheurs à l’époque soviétique. Les prospections systématiques des fonds, animées par Georges Dulac et Serguei Karp (La Culture française et les archives russes. Une image de l’Europe au XVIIIe siècle, 2004 ; Les Archives de l’Est et la France des Lumières, 2007), Bruno Delmas (Les Sources de l’histoire de France en Russie. Guide de recherche dans les archives d’État de la Fédération de Russie à Moscou (XVIe-XXe siècles), 2010), des publications de Petr Zaborov, d’Elena Gretchanaia, de Vladimir Somov, d’Alexandre Stroev ont fait découvrir des écrits et des correspondances inédites de Voltaire, Diderot, d’Alembert, Mme de Graffigny, Grimm, Marmontel, La Beaumelle, Sade, prince de Ligne, Sénac de Meilhan, Potocki, Mme de Staël, Mme de Krüdener, etc. Le dictionnaire Les Français en Russie au siècle des Lumières (éd. A. Mézin et V. Rjéoutski, 2011) décrit des milliers des Français qui ont séjourné en Russie au XVIIIe siècle.

Les ouvrages de Grigori Ghennady, André Mazon, Iouri Lotman et de Viktor Rosenzweig, aussi bien que les recherches menées par Elena Gretchanaia, Catherine Viollet et Emilie Murphy ont fait apprécier l’abondance de la francophonie russe et découvrir de très nombreux écrits inédits. Cependant, ce n’est là que la partie visible de l’iceberg.

Des raisons géographiques, historiques et littéraires expliquent l’existence de plusieurs zones inexplorées. Les bibliothèques et les archives provinciales sont assez peu fréquentées, et des recherches systématiques feront apparaître des manuscrits inconnus, comme ceux qui ont été découverts récemment en Sibérie, à Tomsk et à Novossibirsk (journaux personnels, récits de voyages, poèmes). Certains fonds ont été fermés aux chercheurs, certains types de manuscrits, notamment des traités mystiques ou agnostiques, maçonniques et alchimiques du XVIIIe et du XIXe siècle, n’ont pas été suffisamment étudiés.

Les manuscrits français, conservés en Russie, offrent de vastes possibilités de recherches génétiques, avant tout ceux de Voltaire et de Diderot, sans oublier ceux de Rousseau, moins nombreux et moins bien étudiés. Ainsi, l’approche génétique fait découvrir le travail créateur du prince Charles Joseph de Ligne qui modifie sa correspondance pour en faire des mémoires épistolaires, rédige des « vraies-fausses » lettres pour la publication et, ensuite, dans des éditions postérieures, réécrit le tout encore une fois, pour transformer des mémoires en lettres qui n’ont rien à voir avec des missives originelles.

Sans oublier les écrivains illustres, le projet vise à la découverte et à l’étude d’auteurs et de manuscrits méconnus et inconnus, à partir de recherches sur le terrain et de l’examen des archives. L’accent sera mis sur les écrits qui manifestent l’interaction entre les textes français et francophones : poésie, romans, théâtre, mémoires, journaux personnels, récits de voyage, correspondances privées, savantes, diplomatiques, traités scientifiques, ouvrages philosophiques, historiques et politiques. La constitution de ce groupe de travail sur les manuscrits russes au sein de l’ITEM a été soutenue par la création d’un Projet International de Collaboration Scientifique (PICS) entre le CNRS et l’Académie des sciences de Russie obtenue en 2014 (jusqu’en 2016).

Responsable: Alexandre Stroev, professeur de littérature générale et comparée à l’Université Sorbonne Nouvelle – Paris 3, chercheur associé à l’ITEM

Participent aux activités de ce groupe: Ekaterina Dmitrieva, directeur de recherche à l’Institut Gorki de littérature mondiale, Moscou; Nina Dmitrieva, directeur de recherche à l’Institut de littérature russe – Maison Pouchkine, Saint-Pétersbourg; Carole Chapin, doctorante, Université Sorbonne Nouvelle – Paris 3; Xénia Khomyakova-Borderioux, doctorante à l’Univ. Sorbonne Nouvelle – Paris 3

Institutions partenaires
Institut Gorki de littérature mondiale, Moscou (Académie des sciences de Russie)
Institut de littérature russe – Maison Pouchkine, Saint-Pétersbourg (Académie des sciences de Russie)