23/05/2019 - 24/05/2019, Collège de France et École Normale Supérieure

Affiche-Zola-A4-211x300.jpg

Dans la seconde moitié du XIXe siècle, la question de « l’étranger » croise les questions géopolitiques de l’expansion coloniale et des théories raciales, au moment où éclate l’affaire Dreyfus. Affaire nationale mais aussi Affaire-monde, celle-ci prend définitivement une dimension internationale dès la publication du J’Accuse d’Émile Zola, dans L’Aurore du 13 janvier 1898. Sans prétendre à l’exhaustivité, ce colloque, proposé dans le cadre du « Labex TransferS » (PSL, CNRS/ENS), interroge, par le biais de quelques entrées privilégiées, les échanges interculturels dans le contexte d’une vie littéraire internationalisée, autour de l’Affaire. Souhaitant éviter une normativité ethnocentrique et une exclusivité générique, ce colloque fait trois choix. 1) Il tire ses exemples du corpus large des œuvres appartenant aux naturalismes français et étrangers (C. Becker, P.-J. Dufief, Dictionnaire des naturalismes, 2017), 2) il engage à questionner les liens entre œuvres fictionnelles et non-fictionnelles, en particulier les relations entre le domaine du roman d’un côté, et le domaine épistolaire de l’autre, 3) il explore ces imbrications inter-génériques comme des ensembles relevant de littératies inscrites dans des aires géolinguistiques : logique des « aires culturelles », susceptible d’être interrogée, et qui structure les deux journées du colloque, engageant correspondances, œuvres littéraires et presse internationale.

La colonne vertébrale de ces journées est offerte par le corpus des lettres internationales des « citoyens du monde » adressées à Zola durant l’affaire Dreyfus, suite à la parution de J’Accuse, acte politique qui a connu un rayonnement mondial hors du commun. Que révèlent ces lettres (le plus souvent d’anonymes) de l’image de Zola, des jugements sur ses œuvres et de l’interprétation de son acte politique, selon le pays, la culture, la classe sociale, le métier de l’expéditeur ? Le projet de recherche actuel de l’équipe Zola autour des lettres internationales, débuté en 2017, tentera de répondre à ces questions, qui interrogent les voix épistolaires des « étrangers ». Pour saisir la diversité formelle et idéologique de ce corpus, selon les lieux du monde, il faut en interroger les langues (française et étrangères), les stéréotypes, en expliquer les singularités culturelles, sociales et politiques, mais encore les valeurs qui tournent autour de l’humanisme et de l’universalisme de l’affaire Dreyfus, en tant qu’acte et symbole moral, et politique.

En plus de leur valeur de témoignage historique, ces lettres venues de nombreux pays, ouvrent des perspectives neuves pour l’étude des réceptions du naturalisme zolien, abordées non plus à travers les jugements des « experts » (critiques littéraires, artistes et intellectuels) mais à travers le filtre subjectif des lectrices et lecteurs « ordinaires » qui osent, avec courage, sortir de l’ombre, prendre des risques, et faire entendre leur voix, en écrivant à la première personne. Ils mêlent, parfois en les opposant, les visages d’un Zola biface : le Zola romancier des célèbres Rougon-Macquart et des Trois Villes, admiré ou haï, et l’intellectuel humaniste engagé dans la défense de la justice et de la vérité. La logique des aires géographiques nous permettra d’interroger les relations entre le corpus épistolaire régionalisé et la réception locale des romans naturalistes zoliens, sinon les liens organiques de ces lettres étrangères avec leur contexte culturel et situationnel, sans sous-estimer les circulations entre pays, à l’ère de la presse internationale, du cosmopolitisme et des traductions, qui construisent une image kaléidoscopique d’Emile Zola.

Ce corpus possède une remarquable valeur de témoignage sociologique et ethnographique en ce qu’il s’enracine dans le terreau des épistoliers des pays du monde, et appelle autant une réflexion comparatiste sur le contact des langues et des cultures que sur les valeurs morales et citoyennes de l’engagement participatif des peuples qui regardent, parfois de loin, la Nation France déchirée entre les camps dreyfusards et antidreyfusards.

Programme en pdf

Jeudi 23 mai

Entre affaire Dreyfus et naturalismes : le projet de recherche sur les lettres internationales

(Collège de France, Amphithéâtre Halbwachs)

 

8h45 – accueil du public

9h00 – Geneviève Haroche-Bouzinac (Université d’Orléans, directrice de la revue Épistolaire)

9h15–9h30 – Valérie Spaëth (Université Sorbonne Nouvelle, directrice du DILTEC)

9h30–9h45 – Présentation du colloque : Olivier Lumbroso (Université Sorbonne Nouvelle, DILTEC, co–directeur du Centre Zola de l’ITEM–CNRS)

Matinée : Histoire et contextes

Présidence : Colette Becker (Université Paris Nanterre)

9h45–10h15 – Dr Brigitte Émile–Zola & Jean–Michel Pottier (Université de Reims Champagne–Ardenne) : « Les lettres–monde de l’affaire Dreyfus : un chantier patrimonial »

10h15–10h45 – Alain Pagès (Université Sorbonne Nouvelle) : « L’Affaire dans la correspondance »

10h45–11h15 – Philippe Oriol (Cesacom) : « « Le bon renom de la France à l’étranger » : l’Affaire vue des quatre coins du monde »

11h15–11h30 : Pause

11h30–12h00 – Céline Grenaud–Tostain (Université d’Évry Val d’Essonne) : « Le rayonnement épistolaire de Zola à l’étranger »

12h00–12h30 – Jean–Sébastien Macke (ITEM/CNRS–ENS) : « Éditions numériques des correspondances : un chantier de recherche sur les émotions épistolaires »

12h30–14h00 : Buffet

Après–midi : Regards croisés – Europe/Amérique latine

14h00–15h00 – Table ronde 1 – Les lettres internationales

Modératrice : Kelly Basilio (Université de Lisbonne)

– L’aire lusophone, avec Célia Sousa Vieira (University Institute of Maia, Porto) et Pedro Paulo Catharina (Université fédérale de Rio de Janeiro)

– L’aire hispanophone, avec Olivier Lumbroso (Université Sorbonne Nouvelle)

– L’aire italophone, avec Hortense Delair (Université Sorbonne Nouvelle)

15h–15h15 : Pause

15h15–17h00 – Naturalismes et vérismes d’Europe du Sud

Présidence : Jean–Michel Pottier (Université de Reims Champagne–Ardenne)

– 15h15–15h45 – Kelly Basilio (Université de Lisbonne) : « Les figures de l’étranger dans Les Maias, de Eça de Queirós »

– 15h45–16h15 – Gabriella Alfieri (Fondation Verga, Université de Catane) et Giorgio Longo (Université de Lille) : « Vues et voix de l’étranger dans le vérisme italien »

– 16h15–16h45 – Synthèse du grand témoin : Philippe Hamon (Université Sorbonne Nouvelle)

16h45–17h : Pause

17h00–18h00 – Exposition de lettres de l’étranger, pétitions d’hommages reçues par Émile Zola, et lectures de lettres multilingues : coordination par Hortense Delair & Jean–Sébastien Macke

           Vendredi 24 mai

                    Comparer des aires culturelles

(École Normale Supérieure – 45, rue d’Ulm, salle des Actes)

 

9h00 – Accueil du public

9h20 – Olivier Lumbroso (Université Sorbonne Nouvelle) : Présentation de la seconde journée

Matinée : Regards croisés – Europe du Nord/Amérique du Nord

9h30–10h30 – Table ronde 2 – Les lettres internationales

Modératrice : Aurélie Barjonet (Université de Versailles Saint–Quentin–en–Yvelines)

– L’aire anglophone, avec Isabelle Schaffner (École Polytechnique), Nicholas White (Université de Cambridge) et Élise Cantiran (Université Sorbonne Nouvelle)

– L’aire hongroise, avec Sándor Kálaï (Université de Debrecen), Agnes Elthes (Université des Sciences Techniques et Économiques de Budapest) ; l’aire germanophone, avec Myriam Kohnen (Université Sorbonne Nouvelle) et Karl Zieger (Université de Lille)

10h30–13h00 – Naturalismes d’Europe du nord

Présidence : Jean–Sébastien Macke (ITEM/CNRS–ENS)

– 10h30–11h00 – Claire White (Université de Cambridge) : « Le Demos des deux côtés de la Manche : la lutte des classes chez Zola et Gissing »

11h00 – 11h15 : Pause

–11h15–11h45 – Nicholas White (Université de Cambridge) : « La Débâcle d’Émile Zola et la voix de la nation ».

– 11h45– 12h15 – Hans Färnlöf (Université de Stockholm) : « L’affaire Dreyfus en Suède »

– 12h15–12h45 – Aurélien Lorig (Université Sorbonne Nouvelle) : « Enquête sur la présence de Zola dans l’enseignement suédois et norvégien »

12h45–13h45 : Buffet

Après–midi : Aires francophones & Regards croisés

13h45–14h45 – Table ronde 3

Modérateur : Nicholas White (Université de Cambridge)

– Les aires francophones canadiennes et belges, avec Geneviève de Viveiros (Western University, London, Canada) et Michaël Rosenfeld (Université Catholique de Louvain et Université Sorbonne Nouvelle)

– L’aire proche–orientale, avec Zaki Coussa (ITEM/CNRS–ENS)

14h45–15h45 – Naturalismes du monde : l’apport de la littérature comparée

Présidence : Céline Grenaud–Tostain (Université d’Évry Val d’Essonne)

Regards croisés : Aurélie Barjonet (Université de Versailles Saint–Quentin–en–Yvelines) &Karl Zieger (Université de Lille)

15h45–16h15 – Conclusions du grand témoin : Jean–Baptiste Amadieu (République des Savoirs/CNRS–ENS–Collège de France)

16h15–16h45 – Clôture et remerciements : Olivier Lumbroso, Jean–Sébastien Macke et Jean–Michel Pottier

Informations pratiques :

Entrée libre dans la limite des places disponibles

Jeudi 23 mai 2019 – 8h45-18h00
Collège de France
11 place Marcelin Berthelot, 75005 Paris
Amphithéâtre Halbwachs
Vendredi 24 mai 2019 – 9h00-17h00
Ecole normale supérieure
45 rue d’Ulm, 75005 Paris
salle des Actes (1er étage, escalier A)

Organisation : Centre d’étude sur Zola et le naturalisme (ITEM-CNRS/ENS)

Contacts : Olivier.lumbroso@sorbonne-nouvelle.fr & jean-sebastien.macke@cnrs.fr

Comité scientifique : Jean-Baptiste Amadieu, Aurélie Barjonet, Colette Becker, Céline Grenaud-Tostain, Hans Färnlöf, Philippe Hamon, Alain Pagès, Isabelle Schaffner, Karl Zieger.