Schwarz-Bart / 2020-2021

22/01/2021, 14h30-16h30 (visio-conférence)

Page d’ouvrage annotée par André Schwarz-Bart. Fonds BnF (Photo J.P. Orban)

Sur une page extraite du livre Célébration Talmudique (1991) d’Elie Wiesel, on retrouve, accompagnée de la lettre « K », une note d’André Schwarz-Bart :
Sur une page extraite du livre Célébration Talmudique (1991) d’Elie Wiesel, on retrouve, accompagnée de la lettre « K », une note d’André Schwarz-Bart :
« Tout a été dit et rien n’a été établi :
Tout demeure silence et questionnement,
Questionnement silencieux. 

Tout a été dit : toutes les folies et toutes les

paroles de sagesse, et les folies sages et les sagesses 
pensées de folie. Et toute parole a servi au
mal et au bien, selon le temps et selon les hommes :
toute parole est à la fois nimbée de lumière et éclaboussée de sang. »
 

Cette présentation a pour objet d’aborder, à travers des extraits inédits de la « bibliothèque-manuscrit » d’André Schwarz-Bart, son « Kaddish ». Entre 1959 et sa disparition en 2006, André Schwarz-Bart a consacré un vaste travail de retour au Kaddish en choisissant de faire de cette prière la structure d’accueil d’un véritable monde, une sorte de puzzle à l’état naissant constitué d’une multitude de pièces laissées en partie dans le désordre et dont l’image finale serait l’énigme. Des journaux et des magazines découpés et annotés, des carnets organisant l’inventaire de ses ouvrages, et une bibliothèque pleine de livres enrichis de marginalia : telle serait la forme native de ce dossier de genèse démiurgique. Cette importante œuvre mémorielle laissée en suspens n’est pas une simple hypothèse : partout la notation « K » renvoie bien à l’idée unificatrice du Kaddish, et cette totalité virtuelle faite de notes autographes, d’ouvrages, de pliages, d’arrachage et de pages découpées, porte la marque d’une recherche approfondie. Elle constitue un cas exceptionnel de création exogénétique qui nous force à penser de manière radicale la dialectique du lire et de l’écrire mais aussi du dire et du silence. Elle est aussi l’espace d’une réinvention personnelle où l’écrivain utilise librement l’intertexte sacré pour le transformer en une écriture expérimentale profane, mémorielle et potentielle dans une perspective éthique et humaniste. Ainsi, à la faveur de cette prière sacrée qui se reformule à travers mille citations, c’est la trame sous-jacente de la Shoah qui reprend possession du texte tout entier.

Diplômée de psychologie clinique et de philosophie, traductrice, docteur ès Lettres, Keren Mock enseigne à Sciences-Po Paris et à l’Université de Paris. Après avoir assuré, pendant plusieurs années, la charge de cours d’hébreu moderne à l’ENS de Paris, elle a été lauréate en 2016 de la Visiting Junior Scholar Fellowship du France Stanford Center for Interdisciplinary Studies. Issu de sa recherche doctorale, son premier ouvrage, Hébreu, du sacré au maternel (CNRS Editions, 2016) préfacé par Pierre-Marc de Biasi et Julia Kristeva, interroge la genèse de l’hébreu moderne comme nouvelle langue maternelle. Pour l’année 2020-2021, elle a obtenu le statut de chercheuse associée à la BnF et une bourse de la Fondation pour la Mémoire de la Shoah dans le cadre d’une recherche sur les archives d’André Schwarz-Bart, en collaboration avec l’ITEM (CNRS/ENS).

Contacter Claire Riffard pour le lien de la visio-conférence : claire.riffard@cnrs.fr