Bernadette Charmet

Du récit fictif au journal personnel : l’itinéraire de Jacques de Bourbon Busset

Comment peut-on devenir auteur de journal quand on déteste l’anecdotique, la complaisance, le narcissisme ? Qu’est-ce qu’un « journal de bord », rédigé pendant plus de six ans, et qui va avoir pour résultat d’amener son auteur à accepter l’idée – a priori refusée – d’écrire un journal personnel pour le faire publier ?

Ce sont des problématiques auxquelles on est confronté à la lecture de deux Cahiers inédits de Jacques de Bourbon Busset, écrits entre août 1958 et décembre 1964 ; ils vont permettre de comprendre pourquoi l’auteur, qui a publié jusqu’alors des récits fictifs (même si certains sont en partie d’inspiration autobiographique), choisit de prendre lui-même la parole, après avoir très longuement hésité à le faire.

On verra qu’il y a dans ce choix des raisons formelles, car Jacques de Bourbon Busset s’interroge souvent sur la relation que la littérature doit entretenir avec la modernité, et des raisons de fond, qui tiennent aux préoccupations diverses de l’écrivain – personnage à l’itinéraire peu banal – et à tout ce qu’il aimerait faire passer dans une œuvre dont il voudrait faire « la colonne vertébrale » de sa production littéraire.

En effet, pour Bourbon Busset, le Journal, avant même sa rédaction (il comportera dix volumes, publiés chez Gallimard entre 1966 et 1985), apparaît non pas comme un point de départ, qui pourrait servir de matériau à la création d’œuvres de types divers… mais comme un point d’arrivée, car seule la forme diaristique lui permet d’exprimer l’ensemble de ses aspirations.