Gwenaëlle Sifferlen

Les ratures de Juliette Drouet : étude d’un corpus de lettres à Victor Hugo

Pendant cinquante années (1833-1883), Juliette Drouet écrivit quasiment chaque jour à Victor Hugo. Des milliers de ses lettres sont depuis 2012 en cours de publication en ligne par une équipe interuniversitaire qui les transcrit en suivant un protocole très précis. De ce fait, des spécificités graphiques des manuscrits originaux ou certaines traces du processus d’écriture sont visuellement écartées de la transcription scientifique numérique : c’est le cas des ratures. Or, dans ce journal adressé, elles sont parfois investies d’une véritable fonction communicative qui peut susciter une réflexion herméneutique. À partir d’un corpus de lettres de 1841, nous nous proposerons ainsi de mettre en lumière leurs différentes valeurs.

Gwenaëlle Sifferlen est professeure de Lettres Modernes depuis une dizaine d’années. Après avoir exercé au Lycée Militaire d’Autun, au Lycée Français de Singapour et au Lycée Stendhal de Milan, elle a été affectée dans un IUT de l’Université de Bourgogne où elle enseigne actuellement l’Expression/Communication/Culture et est responsable d’un diplôme universitaire international. Titulaire d’un doctorat de littérature consacré à la correspondance de Juliette Drouet à Victor Hugo, elle prépare actuellement un Master professionnel de Français Langue Étrangère.

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Bénédicte Duthion

Extension du champ de l’écriture personnelle et révélation photographique dans la correspondance de Juliette Drouet à Victor Hugo au début de l’exil

 

Outre sa correspondance avec Hugo et ses lettres familiales, on connait une dizaine d’autres manuscrits de la main de Juliette Drouet qui sont conservés à la Bibliothèque nationale de France (NAF 24794 et NAF 24799) ou à la Maison Victor Hugo de la place des Vosges à Paris. Si la question de l’appartenance génétique de ces textes est différemment appréciée selon les supports de publication (textes autobiographiques, journal, souvenirs, voire œuvre), celle de leur chronologie est intéressante à souligner. En effet, ils sont écrits majoritairement  entre 1852 et 1854. Et trois d’entre eux, Le Journal du coup d’État (fin décembre 1851 – 20 mars 1852), Le Journal de Bruxelles (fin mars – début avril 1852) et Le Journal de Jersey (14 décembre 1852 – 10 janvier 1853) appartiennent à l’empan chronologique du corpus de lettres étudié dans le cadre de ma thèse. Les enjeux liés aux « affinités électives » entre correspondance et journal personnel acquièrent donc une intensité particulière pour la période durant laquelle Victor Hugo et Juliette Drouet vivent à Bruxelles puis Jersey. La diversification des pratiques de l’écriture personnelle transparaît elle dans la genèse de la correspondance ? Des porosités ou influences sont-elles décelables ?

Sur le plan biographique les premières années de l’exil sont, entre autres, marquées par la révolution photographique, à savoir l’introduction du daguerréotype dans le clan Hugo à Marine Terrace. La transcription en continu des lettres de Juliette Drouet à Victor Hugo permet  l’hypothèse d’un aménagement du laboratoire photographique de Jersey plus précoce que la date généralement retenue (août 1852 contre novembre 1852). Elle atteste aussi de la passion de Juliette à l’égard de cette invention et témoigne de sa capacité, en tant qu’épistolière, à révéler sur la page les secrets de ce nouveau médium, hybridation d’art et de technique.

 

Bénédicte Duthion est docteur ès Lettres de l’université de Rouen Normandie au titre de l’année 2015-2016. Sa thèse, codirigée par Françoise Simonet-Tenant et Florence Naugrette, participe du projet collectif visant l’édition critique intégrale de la correspondance de Juliette Drouet à Victor Hugo. Le corpus étudié porte sur les premières années de l’exil (décembre 1851-février 1854). Parallèlement, en tant qu’attaché de conservation du patrimoine, elle a exercé des missions dans le domaine des musées. Elle est actuellement chercheur au service de l’Inventaire et du Patrimoine de la Région Normandie.