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La « genèse externe » a bien intégré la notion d’intertextualité, sous conditions, comme nous le dit Almuth Grésillon dans Éléments de critique génétique (2016, 122), à propos de l’étude de la genèse d’Hérodias (un des Trois contes de Gustave Flaubert) :

Que l’on nous comprenne bien : il ne s’agit point d’étendre la notion de genèse jusqu’à vouloir lui faire embrasser toute l’archéologie du savoir ; quand nous parlons de documents de genèse externe, nous désignons simplement des documents dont il est prouvé qu’ils sont de la main ou de la bouche de l’auteur ou que l’auteur les a lus, regardés ou entendus, proférés, ou, enfin, qu’ils constituent des témoignages de tiers, produits dans le contexte direct de l’écriture d’une œuvre déterminée. […] Que Flaubert ait lu La Vie de Jésus de Renan intéressera le généticien non pas au titre des sources et influences, mais exclusivement au titre de la production, c’est-à-dire dans la stricte mesure où l’écriture de Flaubert importe, déforme, transforme, intègre ou rejette des fragments discursifs empruntés à Renan.

Pour « domestiquer le concept si séduisant, mais si flou d’intertexte », Almuth Grésillon (2016, 204-205) impose donc qu’une trace (note documentaire, fiche de lecture, photographie …) soit disponible, comme support de l’analyse de « la transformation et déformation de discours antérieurs, sur lesquels un nouveau discours se construit » (2016, 205).

La « convergence de la génétique et de l’intertextualité » a produit de nombreux effets, dont certains articles en ligne sur le site de l’ITEM.

Le séminaire de l’équipe « manuscrits francophones » se propose d’y revenir (1), non pour tenter de définir un « intertexte francophone » univoque, dont il conviendrait de cerner les spécificités, mais pour à la fois interroger nos corpus à la lumière de cette convergence, et pour ouvrir le débat génétique. On pourra notamment se demander :

1. Quels sont les procédés intertextuels à l’œuvre dans nos dossiers de genèse :
• Que peut-on en observer, en décrire, en penser ?
• Quels hypotextes sont concernés ?
• Quelles sont les « influences », traditions revendiquées ou rejetées ? …

2. Dans quelle mesure on peut considérer que l’intertextualité appartient de fait à l’heuristique génétique, même en l’absence de manuscrits ou de carnets de travail. Un hypotexte cité, suggéré, parodié, imité, plagié, réécrit … ne constitue-t-il pas en lui-même un avant-texte, qui légitime à lui seul une démarche génétique ?

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(1) Au sens large, qui regroupe à la fois ce que Gérard Genette définit dans Palimpsestes (1982) comme « intertextualité » : reprise d’un texte dans un autre, de manière plus ou moins explicite et littérale, et « hypertextualité » : processus de transformation, de dérivation d’un « hypotexte » à un « hypertexte ».

 

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